Joueur emblématique de l’Olympique lyonnais durant les années 90, le milieu de terrain a porté le maillot rhodanien à 203 reprises. Très prometteur, le Lyonnais de naissance n’a pas eu la carrière escomptée après son départ de Lyon en 1997. Pour Olympique-et-Lyonnais, Sylvain Deplace (50 ans) nous raconte ses souvenirs sous le maillot de l’OL.
Olympique-et-Lyonnais : Sylvain, comment avez-vous intégré l’Olympique lyonnais ?
Sylvain Deplace : J’ai été repéré par Alain Thiry quand je jouais au FC Chazay. Je n’avais que six ans. Alain est allé voir mes parents et ils ont un signé un contrat de non-sollicitation d’une durée de 10 ans. En clair, je ne pouvais pas intégrer un autre centre de formation que celui de l’OL durant cette période. Pour le club, c’était aussi une façon de suivre ma progression. Ensuite, j’ai souhaité passer un cap en m’engageant au FC Villefranche. Finalement, j’ai intégré le centre de formation de l’OL à 12 ans. A cette période, même si j’avais la gagne en moi, le foot n’était qu’un divertissement. Je n’avais pas l’ambition de devenir un jour, un footballeur professionnel. A mon époque, le football faisait rêver les jeunes pour la passion. A l’inverse d’aujourd’hui où ce sont d’autres attributs qui attirent les jeunes mais aussi leurs familles.
On sait que d’un jeune à l’autre, le centre de formation n’est pas perçu de la même façon. Comment avez-vous vécu vos années au sein de cette structure ?
Je l’ai très bien vécu sachant que je rentrais chez mes parents le mercredi pour couper la semaine. C’est un choix qui m’a été bénéfique. Encore une fois, le foot n’était qu’une passion pour moi donc nous étions une bande de potes qui s’éclatait. C’est vraiment quelque chose que je retiens. Cependant, il y avait beaucoup d’intensité et d’exigence au centre de formation. Nous avions des formateurs comme Gérard Drevet et José Broissart qui nous apportaient beaucoup. De toute manière, je pense que chaque joueur nait avec un don. Après tout dépend de ce que l’on en fait. J’ai eu une progression naturelle car j’étais discipliné et à l’écoute. Mes entraineurs étaient comme mes dieux et je tentais de mettre en pratique toutes leurs consignes. Leur exigence m’a permis de me forger un mental d’acier.
Votre progression est telle que vous intégrez l’équipe de France cadets aux côtés d’un certain Zinedine Zidane. Vous prenez conscience de votre potentiel à ce moment-là ?
Je portais le brassard de capitaine de l’OL en cadets nationaux et mes performances m’ont effectivement ouvert les portes de la sélection de ma catégorie d’âge. C’était une véritable fierté, notamment pour ma famille. Mes parents ont fait des sacrifices pour moi. Ils ont toujours cru en moi donc c’était déjà une première récompense. A mes yeux, l’équipe de France, c’était vraiment le Graal ! Je jouais encore dans des champs quelques années auparavant donc j’ai mesuré le chemin parcouru. C’est vrai que j’ai pu jouer avec Zinedine Zidane. Il était déjà exceptionnel à cet âge-là ! Il y avait aussi Christophe Dugarry et Reynald Pédros dans l’équipe.
Ce changement de statut s’est-il accompagné d’un changement de regard à votre égard au sein du club ?
Non. José Broissart veillait au grain. Plus tu as des capacités et plus il était exigeant avec toi. Il me pourrissait, il était derrière moi mais c’était pour mon bien. Sa rigueur m’a sans doute permis de faire carrière. Ce qui était un peu particulier c’est que le club me mettait un peu la pression pour favoriser le foot au détriment des études. Mais, pour moi, les études étaient primordiales car on ne sait jamais de quoi l’avenir est fait dans le football. Or, faire des études permettent de développer de la maturité. Puis, un diplôme nous offre une certaine garantie pour poursuivre dans la vie.
« Durant ma blessure, j’étais insupportable »
Cette maturité vous permet de débuter de façon très précoce avec l’Olympique lyonnais lors de la saison 1988-1989. Vous n’avez alors que 16 ans et demi. Comment s’intègre-t-on dans un vestiaire professionnel à cet âge-là ?
J’étais très intimidité. Honnêtement, je me demandais ce que je faisais là (Rires). Je pense que je ne me rendais pas vraiment compte de ce que cela représentait. Je me souviens que je n’en menais pas large car même si je jouais avec la réserve en Division 3 à ce moment-là, l’équipe première c’était autre chose ! Les adversaires avaient de l’expérience et moi j’étais le petit jeune. L’intégration s’est bien passée car personne ne me mettait la pression. De toute façon, je jouais avec insouciance. A cet âge-là, il ne faut pas trop réfléchir.
Vous avez donc apporté votre pierre à l’édifice lors de la montée de l’OL en Division 1 ?
Oui mais une petite pierre alors (Rires). Pour l’anecdote, tous les sites de statistiques me donnent comme premier match professionnel, le 14 décembre 1991 face à Montpellier. Mais j’ai bel et bien joué quelques bouts de matchs en Division 2 auparavant. Je ne l’oublie pas en tout cas. C’est vraiment à ce moment-là que j’ai réalisé que je pouvais faire carrière. Puis, j’ai subi une pubalgie qui m’a freiné dans ma progression. J’ai été arrêté près d’un an. Et, je n’ai rejoué avec l’équipe première que deux ans plus tard.
Comment avez-vous vécu cette période ?
Sur le moment, ce n’était pas facile. Mais avec le recul, cette blessure m’a permis de progresser. Je me dis que les choses n’arrivent jamais par hasard. J’ai obtenu mon bac L. J’ai gagné en maturité. Je peux vous dire que quand j’ai repris avec l’équipe réserve et que l’on faisait 8h de bus pour aller jouer un match, cela remet les idées en places ! J’étais déterminé à revenir. Puis le fait que le club était monté en Division 1 était une motivation supplémentaire. Mais avant de regagner les terrains, je suis vraiment passé par des moments compliqués.
C’est-à-dire ?
Quand un joueur est blessé, qui plus est un jeune joueur, il est souvent esseulé. C’est ce que j’ai ressenti. De ma génération, il n’y a que Pierre Chavrondier qui a percé donc je n’avais pas forcément beaucoup d’amis au sein du groupe. Le club ne s’occupait pas trop de moi. Puis mon tempérament a fait que j’étais insupportable. J’étais dans mon coin, je tirais la gueule. J’assume pleinement le fait que j’étais une tête de con. Pour être franc, je n’arrivais même pas à regarder un entraînement de mes coéquipiers, c’était au-dessus de mes forces. Je ne ratais aucun match en revanche. Heureusement, je n’ai que très rarement été sérieusement blessé durant ma carrière.
« Raymond Domenech appréciait mon tempérament de gagneur »
Finalement, vous retrouvez l’équipe première le 14 décembre 1991 à l’occasion d’un match à Montpellier (défaite 3-0). C’est ce match qui a marqué votre vrai début de carrière selon vous ?
Non car il ne faut pas occulter ce qu’il s’est passé avant. En revanche, on peut parler d’un nouveau départ. Je rentre en fin de partie et dès les premières secondes, je prends un carton jaune. Cela en dit long sur ma motivation (Rires). Si ma mémoire est bonne, le score fut un peu sévère sur l’ensemble du match.
Lors de cet exercice 1991-1992, vous disputez la bagatelle de 14 matchs. Vous n’avez alors que 20 ans. Si sur le plan collectif, l’OL réalise une saison assez médiocre (16e de Division 1), votre saison personnelle est-elle plutôt réussie non ?
Oui. J’ai eu la chance d’enchaîner après mon premier match à Montpellier. Trois jours plus tard lors de la réception de Monaco à Gerland (victoire 2-0, ndlr), je rentre à la 85e minute à la place de Guillaume Masson. Dans la foulée, je suis l’auteur d’une passe décisive pour Milos Bursac. Je me souviens avoir réussi à parfaitement me jouer de Luc Sonor sur le coup. C’est une action que je garde vraiment en mémoire. Je me rappelle avoir obtenu ma première titularisation à la suite d’une blessure. J’ai réussi à être bon et surtout régulier, ce qui m’a permis de faire mon trou au sein de l’équipe. Même si, effectivement, notre saison n’était pas une franche réussite.
Dernièrement, Gilles Rousset nous confiait que la coupe d’Europe était arrivée un peu trop tôt. Ce qui été l’une des raisons de la mauvaise saison de l’OL. Partagez-vous cette analyse ?
Oui totalement, je pense même que la coupe d’Europe a été un vrai traumatisme pour le vestiaire. Même si je n’avais joué, je peux vous dire que l’on n’avait pas du tout existé contre Trabzonspor (défaite 8-4 sur l’ensemble des deux matchs). Le club n’était pas assez mature et n’avait pas l’expérience adéquate pour ce niveau-là. Il y avait du talent mais le talent sans prise de recul est inutile. Puis derrière, c’est un engrenage négatif qui se met en place avec une mauvaise ambiance et une pression autour de l’équipe, du fait des mauvais résultats. Je me souviens de beaucoup de tensions aux entraînements. Il y a même eu quelques bagarres. Puis les relations de Raymond Domenech avec certains joueurs comme Ricardo Cabanas, Aziz Bouderbala et Alim Ben Mabrouk n’étaient vraiment pas bonnes. Globalement, Raymond est très influent auprès des jeunes joueurs mais il a un peu plus de mal avec les joueurs confirmés. C’est la raison pour laquelle, j’ai été un peu surpris de le voir à la tête de l’équipe de France.
Justement, Raymond Domenech aime faire confiance aux jeunes joueurs. Comment était-il avec vous ?
Déjà, c’est lui qui m’avait lancé au plus haut niveau en Division 2 donc le fait qu’il soit toujours à la tête de l’OL deux ans plus tard a aidé à mon retour. Je sais qu’il appréciait mon tempérament de gagneur et ma façon de jouer. Mon retour a donc été naturel à ses yeux. Après, nous n’avions pas de relation particulière. Je n’avais que très peu de remarques de sa part. Il me laissait tranquille. L’une des particularités de Raymond correspond au fait qu’il a une très bonne capacité d’analyse. Il sait pertinemment s’il faut pousser un joueur pour qu’il soit meilleur ou s’il faut le laisser tranquille. C’est quelqu’un qui a beaucoup compté dans ma carrière. Il m’avait d’ailleurs appelé en équipe de France espoirs lorsqu’il dirigeait cette sélection.
« Mon père est un vrai supporteur mais il avait beaucoup de pudeur avec moi »
Pourtant, il a la réputation d’être assez provocateur. Ce n’était pas le cas avec vous ?
Il l’était, certes, mais assez peu finalement. J’ai deux anecdotes à ce sujet. La première, nous faisons un toro à l’entrainement. Il était au milieu. Lorsque j’ai le ballon dans les pieds, il me met une grosse semelle. Il me relève et me dit, la prochaine fois, tu ne te relèveras pas. A travers cette phrase, il voulait me faire comprendre que je devais être plus agressif. La seconde, on jouait contre Le Havre à Gerland. J’étais au milieu de terrain et j’entends un joueur, dans mon dos, qui me dit de lui faire la passe. Sans réfléchir, je m’exécute. Le problème c’est que c’était Patrice Garande, l’attaquant havrais. Il file au but et marque. Nous avions perdu 0-2 ce soir-là. Je m’étais vraiment fait avoir comme un Bleu (Rires). En rentrant au vestiaire, j’appréhendai un peu la réaction de Raymond. Il ne m’a rien dit hormis le fait que ça me ferait un bon apprentissage pour la suite. Il a su nous transmettre son côté un peu vicelard aussi (Rires).
Qu’est-ce que vous entendez par-là ?
Raymond (Domenech) avait le vice en lui. Il a été joueur et il nous prodiguait quelques « conseils » bien à lui. Un exemple sur les corners. Quand tu es aux prises avec un adversaire, tu lui écrase le pied avec tes crampons en fer de 18 mm pour marquer ton territoire. Sinon quand tu défends sur un corner, tu attrapes le short de ton adversaire pour l’empêcher de sauter. Au cas échéant, tu peux même lui pincer les parties génitales. Mais ça je ne l’ai jamais fait (Rires).
A l’image de la saison précédente, l’exercice 1992-1993 est délicat pour l’OL qui termine à la 14e place de Division 1. De votre côté, c’est la révélation puisque vous disputez 30 matchs sur le maillot rhodanien. Que retenez-vous de cette saison ?
Ce n’était pas évident de jouer, une nouvelle fois, le maintien. Finalement cette saison n’était que la suite logique de la précédente. Je ne peux pas dire que Raymond Domenech avait fait son temps mais on a manqué d’unité. L’ambition était là mais nous n’allions pas dans la bonne direction. Sur un plan plus personnel, il est vrai que c’est ma première grosse saison. Malgré la situation du club, cela ne jouait pas sur mon moral. J’étais jeune, insouciant et le plus important pour moi était de jouer. Heureusement que j’étais dans cet état d’esprit car je ne me posais pas de question. Cela m’a permis de vraiment jouer mon jeu.
Pour un pur Lyonnais comme vous, qu’est ce que cela représente de percer sous le maillot de l’Olympique lyonnais ?
C’était énormément de fierté à la fois pour moi et pour ma famille. Quand j’étais petit, mon père m’emmenait voir les matchs de l’OL à l’époque de Serge Chiesa et compagnie. Nous étions au Virage Sud. Désormais, c’est moi qui étais sur le terrain. J’étais un Gone chez les Gones. Un de mes maillots se trouve d’ailleurs dans le salon de mes parents. Mon père est un vrai supporteur mais c’est un papa à l’ancienne. Il avait beaucoup de pudeur donc on ne parlait pas beaucoup de mes matchs. Ce n’était pas plus mal. Puis le lendemain, on avait toujours nos ballons dans Le Progrès donc cela nous donnait une idée du ressenti extérieur de notre performance. Une fois, j’ai eu droit à un debrief de ma femme et de mon beau-frère mais ils ne l’ont jamais refait ensuite (Rires).
« Jean Tigana, c’était le football total »
L’arrivée de Jean Tigana à l’été 1993 marque un nouveau tournant pour l’Olympique lyonnais. Qu’a-t-il apporté ?
Jean Tigana a réussi à créer un vrai climat de confiance alors que le club en manquait cruellement après deux saisons décevantes. C’est un entraîneur qui mettait le jeu au centre de tout. Les entraînements étaient basés là-dessus. Nous crachions nos poumons mais nous nous n’en rendions même pas compte ! Sa méthode était totalement en rupture avec celle de Raymond Domenech. Nous avions la banane avant les matchs et cela était vraiment très important. Pour moi, son arrivée a eu un vrai impact car j’étais un fan inconditionnel du joueur. Être entraîné par quelqu’un que l’on admire représente vraiment quelque chose. Puis, il était très complémentaire avec les cadres de l’équipe comme Pascal Olmeta et Manuel Amoros, arrivés en même temps que lui.
Le tempérament volcanique de Pascal Olmeta tranche pourtant avec le calme et la sagesse de Jean Tigana non ?
Tout à fait mais d’où le côté complémentaire. Avec les arrivées de Pascal Olmeta, Manu Amoros, Abedi Pelé et Jean Tigana, l’OL a changé d’horizon. Le club en avait besoin. Je me rappelle d’une anecdote avec Pascal après notre première défaite de la saison à Angers (3-1, ndlr). Sur le chemin du retour, nous jouions aux cartes avec Franck Gava, Florian Maurice et Ghislain Anselmini. Après un éclat de rire de notre part, il vient vers nous et nous lance : «On a perdu et ça vous fait rire ? ». Il nous avait vraiment défoncé (rires). Son tempérament extrême de gagnant était une bonne chose pour le club. Mais cela était parfaitement complémentaire du côté ludique de Jean Tigana. Je pense que Pascal Olmeta et Manu Amoros ont vécu une seconde carrière à l’OL. Ils étaient d’ailleurs des titulaires indiscutables.
Malgré ces recrutements, l’effectif de l’OL est, cette saison-là, composé à 63% de joueurs formés au club (15 sur 24 ndlr). Pensez-vous que la formation est la vraie force du club ?
L’Histoire et la réussite du club sont étroitement liées avec la formation, c’est indéniable. Le pire c’est que dans le centre de formation, il y a énormément de joueurs qui ne sont jamais parvenus à jouer en équipe première alors qu’ils en avaient les capacités. A mon époque, je me souviens qu’il y avait David Venditelli, aujourd’hui propriétaire et président du club de Bourg-en-Bresse. Il était exceptionnel. Mais il n’est jamais arrivé à percer. Je n’ai pas peur de dire que ma carrière est née sur un pur hasard. Mais comme bon nombre d’autres joueurs aussi. J’ai eu une opportunité et je l’ai saisi. Ma force de caractère a fait que j’ai pu faire carrière ensuite. C’est, peut-être, ce qui fait la différence par rapport à des joueurs qui sont plus doués que nous. Puis quand on se retrouve en équipe première avec un vrai noyau OL, c’est un vrai atout. Cela est l’une des raisons de notre réussite des années Tigana je pense.
Cette saison 1993-1994 est également la révélation du trio Gava, Maurice, Deplace qui sera une vraie force de l’Olympique lyonnais de l’époque. Comment qualifiez-vous une telle entente entre vous ?
Nous étions très proches, à la fois sur et en dehors du terrain. J’évoquais précédemment notre passion commune pour les cartes mais nous en avions d’autres. Après les matchs notamment, nous mangions quasiment tout le temps ensemble. Nos affinités respectives nous permettaient d’avoir de vrais automatismes. Puis, nous parlions le même langage sur le terrain, nous nous trouvions les yeux fermés. Pour l’équipe, c’était une force.
« Nous aurions pu être champion de France en 1995 »
Après une encourageante 8e place acquise en 1993-1994, l’OL réalise un exercice 1994-1995 impressionnant. Vous terminez 2e de Division 1 derrière le FC Nantes de Patrice Loko et Nicolas Ouédec. Comment expliquez une telle performance ?
Nous étions une bande de potes qui était arrivée à maximiser son potentiel. Les joueurs formés au club, comme moi, étions encore jeunes mais nous avions un passif de trois saisons au plus haut niveau pour la plupart. Nous étions parfaitement encadrés par des joueurs avec beaucoup d’expérience. Puis la méthode Jean Tigana fonctionnait parfaitement. Nous avions fait de Gerland une citadelle imprenable puis nous avions terminé cette saison invaincue à domicile. Quand on jouait chez nous, on avait une vraie assurance. Parfois, en plaisantant, on se demandait combien de buts on allait marquer (Rires). Cette saison, on pratiquait vraiment du beau jeu. Je pense que c’était la plus belle saison du club depuis l’époque Serge Chiesa, Bernard Lacombe et Fleury Di Nallo. Aussi bien au niveau du spectacle sur des résultats. Avec Jean Tigana, c’était le football total.
Malgré les dix points d’écart avec le FC Nantes, aviez-vous la conviction que le titre était possible à aller chercher ?
Bien sûr ! Nous aurions pu être champion cette année-là ! Le vrai tournant de la saison reste ce match à Metz. C’est une rencontre qui fait vraiment partie de l’Histoire du club. Ce jour-là, le terrain était enneigé. C’était le 8 janvier 1995. Nous menions 2-1 lorsque M Harrel, alors arbitre de la rencontre, décide d’arrêter la rencontrer. Peu après l’heure de jeu. En effet, il ne voyait plus les lignes. Mais, il n’y avait ni souffleuse, ni balai ce jour-là au stade. Comme par hasard. Il y a ensuite eu une bataille juridique puisque le résultat avait été entériné puis le match a été donné à rejouer totalement comme si de rien n’était. Nous avons finalement perdu 2-1. Je me rappelle qu’en cas de victoire, nous serions remontés à seulement cinq points de Nantes. Or, le dernier match de la saison était justement un OL-Nantes à Gerland. On aurait pu vivre la même histoire que ce fameux OL-Lens de 2002. Mais sept ans auparavant.
L’OL et le président Aulas n’ont-ils pas manqué un peu d’influence à cette époque ?
Oui c’est une évidence ! L’OL était encore un club moyen à cette période. En face, il y avait le FC Metz et son président Carlo Molinari. Lui avait énormément d’influence c’est certain. Mais cet épisode reste un vrai traumatisme. Manuel Amoros, que je vois encore, m’en parle souvent. Mais c’est aussi parce qu’il avait marqué et que son but n’a pas été comptabilisé du coup (Rires). Pour nous, Metz fut vraiment une équipe maudite puisque l’année suivante, c’est en finale de la coupe de la Ligue qu’il y a eu une polémique…
Avec ce fameux but refusé à Eric Roy…
Oui, il y a eu beaucoup de frustration à l’issue de ce match également. Un trophée serait venu couronner notre belle génération. Le club n’avait rien gagné depuis un moment aussi donc c’était l’occasion. Mais il y a eu ce but refusé puis cette séance de tirs-au-but avec la tentative ratée de Marcelo. On a vraiment l’impression d’avoir fini un cycle après ce match.
« Jean Tigana était comme mon père spirituel »
Globalement, est-ce que cette saison 1995-1996 n’est pas celle de tous les regrets entre cette coupe de la Ligue et une élimination un peu dure contre Nottingham Forest en coupe d’Europe ?
On peut dire ça comme ça oui. Si l’on regarde notre saison, on termine 11e de Division 1, on perd en finale de la coupe de la Ligue et on est éliminés en 8e de finale de la coupe de l’UEFA donc nous n’avons pas réussi à confirmer notre belle saison de l’année d’avant. Malgré tout, il y a, quand même, cette double confrontation contre la Lazio Rome qui restera gravée dans l’Histoire du club. Personne ne croyait en nous et on gagne 4-1 sur l’ensemble des deux matchs avec une énorme victoire à Rome 0-2. Pour moi, c’était exceptionnel d’autant plus que j’avais marqué au match aller. Certes, je contre une frappe de Ludovic Giuly mais il m’a été accordé quand même (Rires). Je pense que c’est mon plus beau souvenir à l’OL. Malheureusement, nous n’avons pas pu passer l’obstacle de Nottingham Forest par la suite alors que nous avions eu moult occasions…
Le départ de Jean Tigana à Monaco durant l’intersaison explique-t-il cette saison plus morose du côté de l’OL ?
C’est l’une des explications forcément. Jean-Michel Aulas avait choisi de miser sur Guy Stéphan qui était l’adjoint de Jean, pour perpétuer notre dynamique de la saison précédente. Guy était un très bon entraîneur mais il n’avait pas la même approche que Jean. Personnellement, je n’étais pas aussi à l’aise. Le climat instauré n’était pas le même. L’ambiance de groupe était moins bonne. Tout comme l’approche tactique. Il laissait moins de place à l’imagination. J’ai pris beaucoup moins de plaisir avec Guy Stéphan. Il faut dire aussi que je considérais vraiment Jean Tigana comme mon père spirituel.
Son départ pour l’AS Monaco vous a vraiment affecté on dirait.
Pour être honnête, il a cherché à me recruter dès son arrivée sur le Rocher. Les discussions étaient bien avancées mais Jean-Michel Aulas a décidé de faire monter les enchères au dernier moment. Je suis donc resté à l’Olympique lyonnais. Mais je voulais vraiment partir à l’ASM. Pour moi, c’était l’occasion de franchir une étape dans un plus gros club. J’avoue que j’ai été un peu aigri de ne pas être parti. Surtout que cette année-là, Monaco termine champion de France.
Votre départ, il aura finalement lieu l’été suivant, en 1997, après une dernière année chaotique sur le plan collectif. Entre la bagarre Olmeta/Sassus et le limogeage de Guy Stéphan en cours de saison, cet exercice 1996-1997 n’a pas été de tout repos. Que retenez-vous de cette dernière saison ?
Pas grand-chose malheureusement. C’est toujours compliqué quand un coach est limogé. On se sent toujours un peu coupable. Pour être poli, je dirais que c’était une année quelconque. De toute façon, après notre saison 94-95, nous n’avons jamais réussi à enchaîner et à retrouver notre dynamique. J’ai terminé mon aventure à l’OL sur deux saisons assez frustrantes. En revanche, je suis vraiment fier, encore aujourd’hui, d’avoir porté le maillot de l’Olympique lyonnais à 203 reprises. Puis, j’ai fait le choix de quitter le club en 1997 pour rejoindre Montpellier. Je l’ai fait pour de mauvaises raisons. Avec le recul, je peux dire que ma carrière s’est arrêtée, à 25 ans, quand j’ai quitté l’OL.
Retrouvez, mercredi prochain, la seconde partie de la rencontre avec Sylvain Deplace. En toute honnêteté, il évoquera les raisons de son départ de l’OL et sa fin de carrière précoce, à l’âge de 30 ans. Aujourd’hui âgé de 50 ans, l’ancien milieu de terrain nous parlera également de sa reconversion et nous donnera son avis sur la situation actuelle du club lyonnais.
Excellente interview de Sylvain deplace qui me rappelle mes premières années au stade.
Les anecdotes avec domenech sont vraiment savoureuses.
Domenech ce n'est pas que le personnage qu'on voit à la télé.