OL – Mercato : Memphis Depay, bad boy au cœur tendre

En enrôlant Memphis Depay, l’Olympique lyonnais a attiré l’un des meilleurs jeunes joueurs d’Europe. Pour arriver au sommet, l’ailier a dû batailler contre la vie, qui ne lui a jamais fait de cadeaux. De Rotterdam à Lyon, en passant par Eindhoven et Manchester, portrait d’un footballeur qui veut toucher les étoiles.

C’est l’histoire d’un gamin turbulent qui avait tout pour réussir dans le foot. Couvert d’éloges dès son plus jeune âge, Memphis Depay est arrivé à maturité à l’âge 15 ans, quand il était au centre de formation du PSV Eindhoven. A cette époque, l’enfant de Moordrecht, un village de la commune de Zuidplas en Hollande-Méridionale, vient de perdre son grand-père, sa figure paternelle. Jusque-là dissipé, le jeune garçon prend conscience de ses qualités. Il sait qu’il va devoir se responsabiliser, canaliser ses émotions, et son caractère parfois un peu trop affirmée. C’est la condition sine qua non, pour toucher du doigt son rêve : devenir footballeur professionnel. Il faut dire que la vie n’a pas fait de cadeau au Néerlandais. Tout jeune, son père, Ghanéen d’origine, l’abandonne, lui et sa mère, Hollandaise. Il n’a que quatre ans. Cette épreuve l’a marqué. Appelez-le donc Memphis, juste Memphis. C’est le nom qu’il inscrit aujourd’hui au dos de ses maillots, ne voulant plus de l’héritage nominatif de son géniteur.

Plus jeune buteur des Pays-Bas en Coupe du Monde

C’est à 17 ans, deux ans après le décès de son grand-père, qui le poussait à persévérer dans le football, que Memphis Depay, atteint son rêve. Il signe son premier contrat professionnel en faveur du PSV. Avant de se faire connaître et de s’imposer, il prendra pendant deux ans, son mal en patience, alternant les entrées en jeu et les matches avec l’équipe réserve. La saison 2013-2014, sera celle de la révélation. Il fait admirer ses qualités et s’impose comme un joueur majeur du onze, alors entraîné par Philippe Cocu. Son année pleine (47 matches, 14 buts, 10 passes décisives toutes compétitions confondues), lui permet de s’envoler pour le Brésil et la Coupe du Monde. Sans jamais être titulaire, il parvient tout même à inscrire deux buts et à délivrer une passe décisive en quatre matches. Il devient aussi, à 20 ans, contre l’Australie, le plus jeune buteur de l’histoire de la sélection batave en Coupe du Monde. Un talent précoce. Surfant sur sa bonne dynamique brésilienne, il réalise une saison 2014-2015 de haut vol. Celle de la confirmation. Il termine meilleur buteur du championnat néerlandais (22 buts), permet à son équipe de remporter le titre de champion et fait saliver tous les plus grands clubs d’Europe. Courtisé par le PSG, c’est finalement Manchester United qui rafle la mise, contre un peu plus de 30 millions d’euros.

C'est Louis Van Gaal, qui le convainc de signer du côté d’Old Trafford. L’entraîneur mancunien, veut faire de Memphis Depay un joueur majeur de son effectif. A peine arrivée il hérite du numéro 7 des légendaires George Best, Éric Cantona, David Beckham ou encore Cristiano Ronaldo. Un poids qu’il assume dès ses premiers matches, puisqu’il se montre décisif d’entrée. A lui tout seul, il gagne le barrage aller de la Ligue des Champions contre le FC Bruges. Ce soir-là, il marque un doublé et délivre un passe décisive (3-1). Le « Théâtre des Rêves » est déjà sous le charme. Un amour réciproque. Malgré la concurrence d’Anthony Martial il réalise une saison pleine pour sa première année en Angleterre (45 matches, 7 buts et 5 passes décisives toutes compétitions confondues).

Depay a besoin de se sentir aimé

Pour tirer la quintessence de ses qualités, Memphis Depay a besoin de se sentir aimé. Il veut être considéré comme un joueur important, majeur. C’est la marque de beaucoup de grands champions. Il marche à l’affect, à la confiance. Le contraire de ce que préconise José Mourinho. Le Portugais n’est pas du genre à mettre un joueur au-dessus du collectif. C’est ainsi que le Néerlandais est devenu un second couteau dans l’effectif pléthorique de Manchester United. Dans la hiérarchie des ailiers il passe derrière Rashford, Lindgard, Mata, Martial ou encore Mkhitaryan. En tout et pour tout il n’a joué que huit matches toutes compétitions confondues cette saison. Pour seulement vingt minutes en Premier League. C’est le troisième joueur le moins utilisé chez les Red Devils. Son entraîneur pointe du doigt son faible investissement à l’entrainement, et son manque d’altruisme.

De par certains aspects, Memphis Depay peut être considéré comme quelqu’un d’arrogant. C’est tout le contraire. C’est un grand garçon, au cœur tendre. Sous ses nombreux tatouages se cache un homme marqué par la vie. Dream Chaser (« Celui qui poursuit ses rêves ») peut-on lire sur son torse. A Lyon, il devrait retrouver l’affection qu’il ne sent plus à Manchester. Bruno Genesio s’est déjà révélé « fan » de lui. Jean-Michel Aulas, lui, n’a jamais hésité déclarer sa flamme à ses stars. Entre Rhône et Saône, l’ailier néerlandais devrait être à nouveau en pleine possession de ses moyens, et profiter d’un climat apaisé.

Ailier virevoltant, formidable produit marketing

Memphis Depay fait partie des meilleurs jeunes joueurs d’Europe. Bon dribbleur, rapide, doté d’une excellente frappe de balle, c’est un profil dont l’OL ne dispose pas. A 22 ans, il lui reste encore une marge de progression importante. Le droitier, est également un formidable tireur de coup-franc, qui utilise aussi très bien son mauvais pied. L’ailier, qui préfère jouer à gauche mais peut aussi évoluer à droite et en soutien de l’attaquant, est doté d’une technique au-dessus de la moyenne. Sa tendance à repiquer vers la surface de réparation, le rend parfois prévisible. S’il gagne en altruisme, il méritera la comparaison avec son aîné néerlandais Arjen Robben, avec qui il partage beaucoup de points communs.

Lorsqu’il est arrivé mercredi soir à Lyon, Memphis Depay a pu faire admirer son excentricité. Le Néerlandais le sait, il jouit d’une belle image de marque. A l’instar d’Alex Morgan, Jean-Michel Aulas, en enrôlant l’ancien joueur du PSV, se dote d’un formidable produit marketing. En octobre 2015 il était le troisième meilleur vendeur de maillot d’Europe, derrière Messi et Cristiano Ronaldo, selon un décompte du site spécialisé dans l'équipement sportif KitBag. Rien que ça. Le Batave, du côté du Parc OL, sauf départ de Clément Grenier, ne récupérera pas son numéro 7 fétiche. Le 22, son premier numéro à Eindhoven, est lui disponible. Attirer, un joueur qui jouit d’un fort potentiel commercial, n’est évidemment pas donné. Le septuple champion de France devrait débourser, 16 millions d’euros, plus des bonus, qui pourraient porter le montant total de l’opération à une somme supérieure à une vingtaine de millions d’euros. Le plus gros investissement depuis un certain Yoann Gourcuff en 2010 (22 millions d’euros). A seulement 22 ans, forgé par une histoire aussi forte que tumultueuse, la romance entre Memphis Depay et l’OL a tout pour être plus belle que celle de l’ancien Bordelais. S’il veut conquérir le cœur des supporters il pourrait dès dimanche se montrer décisif contre l’OM. A moins qu’il n’attende le derby à Saint-Etienne, dans deux semaines, pour capitaliser.