OL : l'erreur tactique de Garde

Pour la deuxième fois de la saison, Rémi Garde a décidé d'évoluer en 3-5-2 (ou 5-3-2 c'est selon), aussi bien pour contrer l'adversaire que pour pallier aux nombreuses absences de son milieu de terrain. Le match de dimanche à Bordeaux a prouvé que ce système n'est pas du tout fait pour l'OL. Et pour d'autres non plus d'ailleurs.

"En mettant trois défenseurs, je voulais m'adapter à l'adversaire en mettant de la taille avec Bakary Koné en défense. J'ai dû me réadapter." Voici la justification de Rémi Garde d'après-match concernant la mise en place de ce système. D'ailleurs, soyons précis, l'OL a évolué en 3-5-2, les latéraux Henri Bedimo et Miguel Lopes étant sur la même ligne que les milieux de terrain. Au moins, on peut accorder à l'entraîneur lyonnais le mérite de s'être rendu compte de son erreur au bout de 30 minutes et d'avoir agi en conséquence. Mais ce coup de poker a failli coûté cher aux Gones, et il peut dire merci à la force mental dont fait preuve ce groupe. Pour le 3-5-2, en France, cette tactique est méconnue, puisque la ligne de quatre défenseurs est sacrée. Ailleurs, c'est autre chose.

Qu'est-ce que le 3-5-2 ?

Dans les années 80, un entraîneur argentin va révolutionner le football en instaurant ce système. Il s'agit de Carlos Bilardo. En 1983, il prend la tête de la sélection argentine après un Mundial 82 raté. Avec un joyau comme Diego Maradona, Bilardo imagine un système fait pour lui, où El Pibe de Oro serait libre de ses mouvements, sans avoir à défendre. Mais il était pris pour un fou, comme pas mal de précurseurs. "Quand j'ai décidé de mettre en place le 3-5-2, les gens se demandaient pourquoi j'avais décidé de jouer avec seulement trois défenseurs et autant de milieux de terrain.", se rappellait-il pour Sofoot.com. "Je me souviens avoir déclaré : « Je préfère être compris par trente joueurs que par trente millions de personnes », le nombre d'habitants qu'il y avait alors en Argentine", rajoute-t-il. Pour l'expliquer en détail, notamment concernant l'aspect défensif, laissons parler le technicien argentin.

"Derrière, un libéro, deux défenseurs centraux et deux joueurs de couloir, même si je n'aime pas trop les appeler comme ça, parce qu'on a l'impression qu'ils sont enfermés dans leur couloir. Je préfère les appeler milieux-latéraux à la limite ... Comme la majorité des équipes jouent avec deux attaquants, on met les deux défenseurs centraux à leur marquage, avec un libéro en couverture, sachant que les latéraux doivent s'occuper du marquage des ailiers. Même si je compte sur eux pour qu'ils attaquent davantage qu'ils ne défendent, et pas seulement du côté où ils jouent", déclarait-il il y a presque trois ans. Pour rappel, l'Argentine a gagné la Coupe du Monde 86 avec ce système, et est allée en finale en 90 ...

La Juventus comme seule héritière

Les latéraux lyonnais n'ont pas dû comprendre ce principe, comme l'atteste la déclaration à la fin de la rencontre  d'Henri Bedimo. "Miguel et moi nous ne savions pas s'il fallait rester haut avec ce système donc on se prenait des ballons dans le dos." En effet, les ailiers bordelais Orban et Saivet sont beaucoup passés en début de match, grâce à des ballons par dessus Lopes et Bedimo. Ils se retrouvaient ensuite au duel avec Koné ou Bisevac, bien plus lents qu'eux donc en difficulté, et l'axe était délaissé. Même quand elle était en place, l'arrière-garde lyonnaise n'arrivait pas à relancer ou à se dégager, comme sur le but de Saivet. Surtout, en se rappelant Bilardo, pourquoi mettre deux centraux autour d'un libéro face à un seul Guillaume Hoarau ? L'adaptation à l'adversaire a des limites.

D'ailleurs, l'Argentin est conscient de la difficulté du 3-5-2. "J'ai l'impression que les entraîneurs n'ont pas les joueurs pour le mettre en place en sélection. Aujourd'hui, il est plus simple de jouer à quatre derrière, car c'est le système le plus courant en club et que les sélectionneurs n'ont pas le temps de développer le 3-5-2. Jouer à trois derrière, c'est très risqué. Cela donne du beau jeu si c'est bien assimilé, mais sans pratique, c'est difficile que ça fonctionne." Cependant, une seule équipe de club joue comme cela, c'est la Juventus Turin. Le système est privilégié par Antonio Conte, et l'Italie de Cesare Prandelli l'utilise fréquemment en sélection, en s'appuyant sur cette base turinoise. Mais on le voit sur la scène européenne, ce système n'a pas encore porté ses fruits pour la Juve, pourtant pratiqué depuis trois saisons. Et l'OL aurait du l'assimiler en une semaine ...