Quelques semaines après son retour à l'OL, Eugénie Le Sommer s'est confiée pour Olympique et Lyonnais sur son passage aux Etats-Unis, sa reprise avec les Fenottes, mais aussi sur les différences entre football français et américain.
Olympique et Lyonnais : Comment s’est passé votre retour à l'OL ?
Eugénie Le Sommer : Il s’est très bien passé. Je connaissais presque toutes les filles, le staff aussi même si on avait changé en fin de saison dernière, j’étais encore présente. On a travaillé un mois ensemble donc je n’étais pas perdu. Ce n’est pas comme lorsque tu es une nouvelle joueuse et que tu découvres tout. Je pense que cela permet de s’adapter plus vite. Le but pour moi, c’était de retrouver la forme, la dynamique de l’équipe et aussi le jeu, même si l’OL Reign avait plus tendance à jouer que certaines autres équipes car on avait des bonnes footballeuses dans l’effectif. J'ai eu un temps d’adaptation et je l’ai encore, mais dans l’ensemble ça va et j’en suis très contente.
A-t-il été facile de retrouver vos repères dans cette équipe ?
Oui ça l'a été. Après, les premiers entraînements étaient aussi ma reprise. Les attentes sont forcément différentes car le staff a changé. Il y a donc un nouveau modèle de jeu à intégrer, c’est l’enjeu de ce retour, comprendre le système, les demandes de Sonia (Bompastor) et avoir les automatismes avec mes coéquipières, même si je connais la plupart, il y a aussi des nouvelles.
"J’étais bien à Lyon, mais je me suis dit que c’était maintenant ou jamais"
Cette coupure avec l’OL et ce dépaysement étaient-ils nécessaires alors que cela faisait 11 ans que vous jouiez pour les Fenottes ?
C’était plus une opportunité. Je ne sais pas comment j’aurais été en début de saison si je n’étais pas allée là-bas. Je ne suis pas partie car je voulais voir autre chose et que j’en avais marre. J’étais bien à Lyon, mais je me suis dit que c’était maintenant ou jamais. Je l’ai plus pris comme une opportunité de voir autre chose. Le fait que ça soit avec l'OL Reign qui appartient à l’Olympique lyonnais, cela a facilité les choses. C’est la première fois que je vivais une saison sur un calendrier différent, cela change et ça m’a permis d’avoir une grosse coupure entre mi-novembre et décembre, car j’avais enchaîné depuis début juin 2020. J’ai fait mon expérience à l’étranger et je pense que si je ne l’avais pas faite, j’aurais eu des regrets. J’avais depuis longtemps cette idée de jouer dans un autre pays. C’est plus pour ça que je l’ai fait, pour un enrichissement personnel et sur le terrain.
Auriez-vous envie d’ici la fin de votre carrière de renouveler cette expérience à l’étranger ?
C’est sûr qu’aujourd’hui, il y a beaucoup plus d’opportunités de jouer ailleurs que lorsque j’ai débuté. Les championnats étrangers s'améliorent. Avant, il y avait les Etats-Unis et la France, maintenant, l’Angleterre, l’Espagne et l'Italie émergent. Mais là, je vis un peu au jour le jour. Je suis sous contrat jusqu’à l’année prochaine et je ne me projette pas pour l’instant. On verra ce que le club et moi désirons à la fin de mon bail ici. C’est trop tôt pour parler de mon avenir, mais ce qui est certain, c’est que d’autres compétitions se développent et que dans l’Hexagone, on ne doit pas rater le train.
Après 6 mois aux Etats-Unis, avez-vous noté des changements au club depuis votre retour ?
Oui il y en a eu quelques-uns. Déjà au niveau du staff, certaines personnes sont arrivées, ce qui a apporté des compétences en plus. Au niveau du management et de l'organisation, c’est un peu différent. Mais il n’y a pas eu de grande révolution, ce sont plus des petites choses.
"Si on regarde les autres pays à côté, ils vont un peu plus vite"
Suite à votre expérience américaine, quel regard portez-vous sur la D1 ?
Les équipes ont évolué, certaines ont progressé, d’autres sont descendues. Le niveau général augmente, c’est de plus en plus dur de gagner des titres, et on le voit encore aujourd’hui. Sur ce sujet, c’est vrai que le championnat est plus attractif qu’avant, maintenant, il faut encore se donner les moyens de faire mieux. Si on regarde les autres pays à côté, ils vont un peu plus vite. Mais je suis contente de retrouver la D1 et d’y rejouer.
Vous n’avez pas mis longtemps pour retrouver le chemin des filets avec ce but à Montpellier (2-3) …
Ça fait toujours plaisir de marquer et d’aider l’équipe surtout. Ce but nous a permis de repasser devant. Parfois, ta réalisation n’a pas la même sensation lorsque tu marques pour le 6-0 ou pour le 2-1, donc c’est aussi pour ça que j’étais contente, même si quelques minutes après, on a concédé l’égalisation. Forcément j’avais envie de marquer le plus rapidement possible après mon retour pour prendre confiance. Ça m'a fait du bien, en plus, il y a la victoire au bout, ça n’aurait pas eu la même saveur sinon.
"Je me sens plus complète qu'avant"
Pensez-vous avoir progressé d’un point de vue footballistique après votre expérience américaine ?
Oui je pense avoir ajouté des choses en plus à mon jeu. Je me sens plus complète qu'avant. Pour moi, une joueuse ou un joueur peut progresser jusqu’à la fin de sa carrière. C’est comme ça aussi que je l’ai vu en partant là-bas, je voulais progresser et ne pas rester sur mes acquis. Bien sûr, je voulais aider le groupe avec mes qualités, mais aussi apprendre ce que je pouvais améliorer et ce sur tous les points : physiquement, tactiquement et techniquement. Je suis contente de ça et quelque part, je me dis que je suis meilleure qu’avant.
Existe-t-il des différences au niveau de l’entraînement entre les Etats-Unis et la France ?
Là-bas, il faut faire en fonction des voyages. En plus, on était sur la côte ouest. Ton planning d’entraînement n’est pas le même car tu fais des déplacements de trois jours, des vols de 6 ou 7 heures. C’est des choses qui sont prises en compte dans la préparation du match et dans la récupération. Souvent, on avait un ou deux jours off après la rencontre. Se préparer lorsque tu traverses le pays avec trois heures de décalage horaire, ce n’est pas la même chose que lorsque tu fais une heure de train. Ce sont des éléments que j’ai découverts là-bas et j’ai essayé de m’adapter au maximum. Il y a aussi le climat qui diffère, et tu ne connais pas ça en France. Le corps doit s’habituer à cela pour être le plus performant possible. Toutes ces choses sont à prendre en compte, ce qui n’est pas le cas ici. C’était enrichissant de ce point de vue là, j’ai pu voir un peu les différences.
Comment l’OL est perçu au Etats-Unis ?
Il est perçu comme l’un des meilleurs clubs du monde, de par son palmarès, surtout par rapport à la Ligue des champions. Les Américaines suivent beaucoup cette compétition, moins le championnat. Les joueuses passées par l’Olympique lyonnais ont également fait connaître l’OL.
"La NWSL est plus relevée que la D1"
Aujourd’hui, quelles différences voyez-vous entre le championnat américain et la D1 au niveau du jeu ?
Il est plus basé sur le physique, de plus longues courses. C'est plus athlétique dans ce sens, avec plus d’intensité. Mais c’est peut-être aussi qu’à l’OL, on a un jeu plus en possession et que lorsqu’on affronte d’autres équipes, elles ont tendance à nous attendre. Tu as donc moins besoin de jouer comme cela. C’est le jeu qui te dicte comment tu dois évoluer. Tu peux être une équipe athlétique, mais si tu es face à un bloc bas, ça sera difficile. Donc je pense que c’est aussi l’ADN OL et la manière dont jouent nos adversaires qui font les différences entre Lyon et les Etats-Unis.
Dans le championnat américain, le niveau est très homogène. Chaque week-end, tu ne sais pas si tu vas gagner ou perdre, le dernier peut battre le premier. La compétition est beaucoup plus intéressante de ce point de vue là. C’est aussi le système américain qui veut ça avec la draft, les trades, afin que les équipes se valent toutes à peu près. C'était une belle expérience pour ça aussi. La NWSL est globalement plus relevée que la D1. Bien sûr que l’Olympique lyonnais et le PSG pourraient y évoluer, et à l’inverse, les formations américaines ne joueraient pas le bas de tableau chez nous.
Et entre les joueuses françaises et américaines ?
La plus grosse différence, c’est qu’elles ont toutes une base athlétique au-dessus de la moyenne en France. Elles sont déjà prêtes physiquement pour le monde professionnel lorsqu’elles sortent de l'université. Elles ont déjà ce bagage que nous on acquiert en s’entraînant et en arrivant dans un club. C’est aussi parce qu’ils mettent l’accent là-dessus dans leur formation. Après, on n’a rien à envier aux Américaines au niveau technique et tactique.
Avez-vous le regret de ne pas avoir remporté le titre en NWSL ?
C’est digéré, mais il y a forcément un petit regret car on a été en demi-finales. Maintenant, si lorsque je me suis engagée là-bas on m’avait dit qu’on atteindrait le dernier carré, j’aurais signé tout de suite. Donc j’étais contente mais en même temps, ce n’est jamais facile de perdre un match comme cela, on était proche de la finale et de prétendre au titre. Quand je regarde en arrière, la saison qu’on a eu, on est parties de tout en bas pour remonter, c’était extraordinaire. J’ai aussi vécu des choses avec mes coéquipières et le staff qui vont m’apporter sur le plan mental et footballistique, ça m’a enrichi.
"Dans le fonctionnement, c’était différent"
On imagine donc que vous souhaitez rattraper tout ça avec l’OL cette saison ?
Oui forcément on veut regagner le plus vite possible. On souhaite rebondir et j’espère qu’on va le faire. Ça sera difficile, chaque match sera dur, mais on est prêtes pour cela et on est à Lyon pour remporter des titres.
Existe-t-il des similitudes entre l’Olympique lyonnais et l’OL Reign ?
Non pas vraiment. Le staff est étranger avec des Américains, des Anglais… Les infrastructures aussi sont complètement différentes. Le point commun, c’était les joueuses comme nous (avec Sarah Bouhaddi et Dzsenifer Marozsán) qui arrivions ou celles qui étaient déjà passées à l’OL et qui connaissaient donc le club. Bruno Cheyrou aussi venait régulièrement pour faire le lien entre les deux formations. Mais dans le fonctionnement, c’était différent, en tout cas pour l’instant. Ce n’est que le début de ce projet, donc peut-être qu’à l’avenir ça changera.
"L'équipe de France reste un objectif"
Ce mardi, Corinne Diacre dévoilera sa liste pour le Tournoi de France, vous espérez y être ?
Oui bien sûr que j’ai envie d’y être et que j’espère être appelée. Maintenant, entre vouloir et y être, il y a une différence. On verra bien, c’est ça le mot, on verra. Je ne peux pas maîtriser ce qui se passera. Mais ça reste un objectif.
Retrouvez la première partie de notre entretien avec Eugénie Le Sommer ici.