OL : les confidences de Milan Bisevac

C'est un long entretien réalisé en septembre dernier et publié dans le magazine Lyon Capitale (numéro 725) . Milan Bisevac avait accepté de revenir sur arrivée à Lyon et son souhait de voir l'OL retrouver le chemin du succès. C'était avant la cuisante défaite à Montpellier et les tensions apparues au grand jour. Actuellement blessé, le Serbe devrait prochainement faire son retour sur les terrains.

Tous les observateurs s’accordent à dire que le titre de champion de France de Ligue 1 se jouera cette saison entre le PSG et Monaco. Selon vous, le championnat est-il déjà plié ?

Milan Bisevac : Non, il n’est pas plié d’avance (entretien réalisé en septembre dernier, Ndlr). Il y a des matchs à jouer. Même si Paris et Monaco ont dépensé beaucoup d’argent en recrutant de bons joueurs, ça ne veut rien dire. C’est une bonne chose pour le championnat de France de voir arriver de tels joueurs. Il va y avoir de grands matchs en perspective. Lyon est là et va avoir une carte à jouer. On a une belle équipe. Ce n’est pas une star qui gagne à elle toute seule un championnat, mais un collectif. Cette saison, on a notre chance.

Certains ont été surpris de vous voir quitter un club comme le PSG et ses stars pour l’OL, qui ces dernières années a beaucoup moins la cote...

Tout d’abord, je n’ai aucun regret ! Lyon, c’était mon choix. Je suis très content et très fier de porter le maillot de l’OL. Lorsque j’étais à Paris, j’ai donné mon maximum, je pense avoir fait une bonne année là-bas. Après, chacun fait sa carrière. J’ai décidé de rejoindre Lyon, qui m’a proposé un contrat de quatre ans. C’est un grand club, qui a gagné de nombreux titres.

Depuis votre arrivée, peut-on dire que nous avons vu le vrai Milan Bisevac. Pouvez-vous apporter davantage ?

J’essaie toujours de donner le maximum, mais c’est clair que je peux apporter plus. J’ai vraiment envie à chaque match de faire mieux...

La défense lyonnaise est souvent la cible des critiques. Cela vous semble-t-il justifié ?

Quand vous jouez dans un grand club comme Lyon, à chaque fois, la défense est exposée. Tout le monde regarde à la loupe les erreurs défensives. Il faut l’accepter. C’est vrai qu’il y a des matchs où l’on a déconné ! On a pris des buts bêtes, souvent contre des petites équipes. Ceci dit, par rapport aux années précédentes, la défense a progressé. La saison dernière, on a encaissé 38 buts, c’est beaucoup moins que les 51 encaissés lors de la saison 2011-2012. Je vous l’accorde, on peut faire mieux. Au sein de cette défense, il y a eu des changements. De nouveaux joueurs sont arrivés, d’autres sont partis, il faut donc un temps d’adaptation. Il ne faut pas non plus couper l’équipe et séparer la défense de l’attaque. Dans une équipe, tout le monde doit attaquer et défendre ensemble.

Que pouvez-vous apporter à Lyon ?

J’ai beaucoup d’expérience, de matchs dans les jambes. Je suis en Ligue 1 depuis sept, huit ans. Avec mes qualités, je peux apporter quelque chose à l’OL. Bien sûr, ce n’est pas que moi, un seul joueur ne peut pas tout faire seul. À chaque match, je veux mouiller le maillot et me battre sur le terrain pour aider mon équipe à gagner.

Vous êtes l’un des joueurs lyonnais qui a le plus de bouteille. Quel est votre rôle au sein d’un vestiaire assez jeune ?

Effectivement, le vestiaire est jeune, mais il est très doué. Le centre de formation de l’OL, c’est vraiment quelque chose d’énorme. Il y a beaucoup de potentiel ! Toutes les années, ils réussissent à sortir de bons joueurs. Après, il faut être patient avec eux. Mon rôle, avec les autres joueurs expérimentés, c’est de leur parler, les conseiller le mieux possible. Vous savez, il faut être très vigilant. Lorsqu’un jeune fait un bon match, il peut vite s’enflammer. C’est humain. Il faut donc être attentif à cela. Une carrière se construit sur la durée. Le plus dur est de confirmer.

Cela vous plaît d’être en quelque sorte un grand frère pour ces
jeunes ?

Je ne suis pas le grand frère. J’essaie juste de les aider, les guider pour le bien de l’équipe. Quand j’étais un jeune joueur, j’ai pu compter sur les conseils de cadres, alors je tente de faire la même chose. Je les encourage pour leur donner de la confiance. C’est indéniable, ils ont de la qualité, c’est juste ce qu’ils ont dans la tête qui va faire la différence.

Que ce soit sur les réseaux sociaux ou dans vos différentes interviews, vous affichez toujours une soif de vaincre. D’où vient cette haine de la défaite ?

J’ai toujours envie de gagner. Chaque défaite, je l’accepte mal. Pendant deux, trois jours, je ne suis pas bien (sourire). Je suis un compétiteur, j’ai toujours envie de gagner. Mais, comme je dis souvent : si tu ne sais pas perdre, tu ne sais pas gagner. Même si ce n’est pas toujours évident, il faut toujours faire la part des choses. Pour répondre précisément à votre question, je suis originaire d’un pays où l’on a un caractère un peu dur. Ma vie n’a pas toujours été facile lorsque j’étais enfant. Cela vient sûrement de là. J’ai envie de ne rien lâcher, de toujours gagner !

Avez-vous un plan de carrière bien établi ?

Non, je vis au jour le jour. Tout va tellement vite dans le football. À l’heure actuelle, je suis bien à Lyon, je peux encore jouer quelques années au plus haut niveau. J’ai encore les jambes et l’envie.

Intéressons-nous à votre vie personnelle, celle qui se déroule en dehors des terrains. Vous avez deux enfants et vous semblez soucieux de passer du temps auprès d’eux...

Vous visez juste. Pour moi, la famille, c’est le plus important. J’adore mon métier, c’est super de jouer au football, mais ma famille passe en premier. Je suis heureux en tant que père de famille. Je profite de chaque instant avec eux. De les voir grandir, jouer, rire... C’est ça la vie, non ?

Votre vie lyonnaise vous plaît-elle ?

À Lyon, tout me plaît. Sincèrement. Au début, mes amis m’ont dit : “Mais comment tu vas t’adapter ? Tu vas passer d’une ville comme Paris à... Lyon ?” Eh bien, cela n’a pas été un souci. Même si j’ai galéré à trouver un logement, je me régale dans cette ville avec ma femme et mes enfants. On se plaît beaucoup ici. On aime Lyon.

Qu’avez-vous envie de dire aux Lyonnais qui connaissent pas ou mal votre pays, la Serbie ?

Il y a beaucoup d’étrangers qui ont peur d’aller en Serbie par rapport à ce qui s’est passé avec la guerre.
Mais, une fois qu’ils y vont, ils découvrent un beau pays. Il ne faut pas juger sur ce qu’on voit à la télé, mais se rendre sur place pour juger soi-même. Alors, j’ai envie de dire aux Lyonnais : allez visiter la Serbie et dites-moi ce que vous en avez pensé (rires).

On a souvent tendance à parler du côté bling-bling des footballeurs. Quel est votre rapport à l’argent ?

(Éclat de rires.) Ah ! une sacrée question pour finir. Je n’ai pas pour habitude de parler d’argent. Cela me gêne. Quand j’ai commencé ce métier de footballeur, je ne me suis jamais dit que j’allais gagner des millions. Je n’ai jamais raisonné de la sorte. Je voulais jouer pour le plaisir du jeu, et surtout, en Serbie, je voulais évoluer à l’Étoile rouge de Belgrade. C’était un rêve de porter le maillot de cette équipe. Aujourd’hui, il y a beaucoup d’argent dans le milieu du football. Il y en a même trop. Dans le monde actuel, il y a beaucoup de gens en difficulté, c’est pour cela que je suis gêné de parler de tout ça. Une carrière est courte. Un joueur gagne bien sa vie, mais il doit penser à l’après.