Rémy Riou : "A l'OL, on n'a pas cru en moi"

Sans l'once d'un remords, Rémy Riou, gardien formé à Lyon (1995-2005), ne regrette pas de ne pas avoir percé à l'OL. A tout juste 26 ans, ce Lyonnais pur souche, désormais titulaire au FC Nantes, évoque sa ville de coeur, ses expériences à Lorient, Auxerre ou Toulouse, l'équipe de France, et bien évidemment, le match de dimanche face aux Gones.

Olympique-et-lyonnais.com : Vous étiez légèrement blessé à la cheville cette semaine. Vous allez pouvoir jouer dimanche ?

Rémy Riou : J'ai repris l'entraînement vendredi matin, donc ça devrait aller. Je n'ai plus mal, je serai bien là.

Qu'est-ce que vous ressentez avant de revenir à Gerland ?

C'est particulier, cela a une saveur particulière. J'ai laissé toute ma famille, tous mes amis là-bas. Lyon, c'est ma ville, je suis un pur lyonnais, j'ai un restaurant et une association ("Un fauteuil à la mer", Ndlr) donc je reviens souvent. Après, je n'ai plus de contacts à l'OL.

Quel va être l'objectif pour le FC Nantes dimanche ?

L'objectif, c'est de gagner. Je joue tous les matchs pour les gagner que ce soit à Lyon, à Paris ou à Lorient. Si vous êtes optimiste et compétiteur vous jouez pour remporter des rencontres, pas pour ne pas perdre. Même si on sait que ça va être difficile, qu'il faudra faire beaucoup d'efforts. Mais si on fait match nul ça sera très bien.

Quel regard portez-vous sur cette équipe lyonnaise qui a été très rajeunie ? Aujourd'hui, les jeunes ont leur chance contrairement à votre période à l'OL...

Lyon a toujours pu s'appuyer sur son centre de formation même s'il faisait moins confiance à l'époque. Il y a un très bon centre de formation avec de très bons éducateurs. C'est bien pour l'OL de se retourner vers son centre parce qu'on connait la conjoncture économique actuelle. Quand on sait qu'on peut s'appuyer sur son centre qui est de qualité, c'est toujours plus facile.

Est-ce que l'équipe fait moins peur qu'avant ? 

Quand on venait jouer contre les Diarra, Essien ou Juninho, forcément c'était impressionnant. L'équipe était bâtie pour jouer sur le toit de l'Europe. L'OL est peut-être moins impressionnant sur le papier mais sur le terrain c'est toujours costaud. On sait qu'ils seront toujours là, dans le top 5 à la fin. C'est toujours compliqué de jouer Lyon.

"A Lyon, on ne m'a pas fait confiance"

Vous avez signé votre premier contrat professionnel à l'OL en 2005. Mais vous n'avez jamais votre chance. Comment l'expliquez-vous ?

Je pense qu'on ne me faisait pas spécialement confiance. J'avais aussi Grégory Coupet devant moi à l'époque. Pour moi, c'était le meilleur gardien du monde. Faire jouer un jeune de 17 ans alors qu'on veut gagner la Ligue des champions c'est dur. Après, on ne comptait pas trop sur moi. J'ai préféré partir pour m'aguerrir ailleurs.

Vous n'avez jamais eu de problème avec Joël Bats ?

Non non, je n'avais pas trop de contacts avec lui. Je ne m'entraînais pas souvent avec les professionnels. Des choix ont été faits qui n'ont pas été en ma faveur. J'ai compris très tôt qu'on ne comptait pas sur moi. Je ne pouvais pas revendiquer une place de titulaire alors que Greg Coupet était au top. Donc je suis allé grappiller du temps de jeu ailleurs.

Avant d'affronter l'OL ne ressentez-vous pas quand même quelques regrets ?

Je n'ai pas de regrets. Je savais que ça serait compliqué de s'imposer avec Greg. Et puis je n'ai que 26 ans. Ce que j'ai fait m'a permis d'acquérir de l'expérience. Je sais maintenant les erreurs qu'il ne faut pas faire. Je sais ce qu'il faut plus ou moins faire pour aspirer au haut niveau. J'ai toutes les cartes en mains pour pouvoir grandir et m'imposer.

"Je croyais que mon talent allait suffire. J'ai payé mes erreurs de jeunesse"

Vous êtes prêté à Lorient (2006) où vous devenez assez rapidement un des plus jeunes gardiens de Ligue 1 (19 ans). Puis après vous êtes transféré à Auxerre (2007) où vous ne parvenez pas à devenir un titulaire indiscutable. Quel regard portez-vous sur ces deux expériences ?

Ça m'a permis de comprendre ce qu'est le monde professionnel. Je ne comprenais pas trop pourquoi Greg travaillait autant. La-bas j'ai compris pourquoi : c'était pour être tout le temps au top et encore meilleur. Je suis arrivé à Auxerre avec mes quelques matchs de Ligue 1 en pensant que mon talent allait suffire. J'ai moins travaillé, j'étais moins investi à l'entraînement et ça se répercute en match. J'ai payé mes erreurs de jeunesse.

Alors vous décidez de partir à Toulouse. Mais là aussi, vous n'arrivez pas à éclore. Vous tombez sur un jeune gardien qui explose au haut niveau (Ali Ahamada). Le doute s'est-il installé dans votre tête ?

Je suis arrivé blessé là-bas. J'ai tenté un pari. Mais le coach ne savait pas trop si Ali Ahamada pouvait assumer une saison en Ligue 1. Malheureusement pour moi, il fait une bonne saison donc je suis relégué sur le banc. Mais j'ai compris qu'il fallait travailler pour obtenir ce qu'on voulait donc j'ai pris le temps pour bien me remettre de ma blessure.

Vous rebondissez à Nantes en Ligue 2 en 2012. Dans l'esprit de repartir à zéro ?

Le but c'était d'aller dans un gros club de Ligue 2 qui jouait la montée. C'était dur de trouver un poste de titulaire en Ligue 1 après trois années difficiles. J'ai essayé de descendre d'un échelon pour mieux repartir. Je savais de quoi j'étais capable. Il fallait un club qui me fasse confiance. Et Nantes est arrivé à ce moment-là, c'était parfait.

Quelles sont vos ambitions personnelles pour la suite de votre carrière ?

On a toujours des ambitions élevées. Mais j'ai arrêté de me projeter dans l'avenir (rires). On se voit au top alors que c'est le jour J qu'il faut être présent. Maintenant je travaille dur à l'entrainement. J'essaie d'être exigeant avec moi-même. La saison est longue, j'enchaîne les matchs. Je prends de l'expérience. On va essayer de se maintenir le plus tôt possible.

Vous avez fait partie de la fameuse génération 87 (Benzema, Ben Arfa, Mounier, Rémy). Comment expliquez-vous que ces joueurs aient pris des chemins si différents ?

A Lyon, on n'avait que la formation dans les jambes. A notre période, l'OL visait la Ligue des champions. C'était difficile de s'intégrer dans le groupe professionnel. Quand on veut trouver un club à 18 ans et tout de suite s'éclater c'est compliqué. Pour les joueurs offensifs, c'est plus facile. On peut plus facilement faire rentrer un attaquant qu'un défenseur. Je pense à Karim Benzema et Anthony Mounier qui ont eu leur chance. Les joueurs défensifs, on a un peu plus galéré. Mais ceux qui avaient du talent et qui ont travaillé sont au plus haut niveau maintenant.

"Je suis content pour Anthony Lopes. C'est un bon petit"

Que pensez-vous d'Anthony Lopes, titulaire à l'OL à seulement 22 ans ?

Je suis content pour lui, c'est un bon petit. Quand j'étais à l'OL il était plus jeune, il était en formation. On parlait beaucoup de lui à Lyon. Il avait beaucoup de qualité. C'est bien qu'il soit là, il fait de bons matchs. C'est bien de voir un gardien formé au club qui s'impose. Il gère pour l'instant c'est bien, il faut qu'il continue.

N'avez-vous pas peur que vos propos dans 20 Minutes, où vous dites que Lyon n'est pas une ville de foot, soient mal interprétés par les supporters lyonnais ?

Ce n'était pas du tout "une pique" que j'ai lancé. Ce n'était pas le but. C'était une constatation. Il y a moins de monde au stade à Gerland car il y a moins de joueurs connus qu'avant. A mon époque, on venait voir Juninho et compagnie. Mais aujourd'hui, il y a un peu de ferveur autour du petit Grenier. Les gens vont revenir au stade.

Justement, Clément Grenier est devenu un spécialiste des coups francs. N'avez-vous pas peur de ses coups de pied arrêtés ?

Si je commence à avoir peur... Il faut que j'arrête le foot (rires) ! C'est justement intéressant de se frotter à ces joueurs. On prend du plaisir sur le terrain. Clément était au centre avec moi, il faisait partie des générations en dessous avec d'autres jeunes comme Alexandre Lacazette ou Maxime Gonalons. Ils essayaient de faire leur trou dans notre génération mais on était costaud (rires).

Crédit photo : ©PHOTOPQR/OUEST FRANCE