OL : Willem Geubbels ou les dérives de l'entourage des jeunes joueurs

Alors qu’il ne signera jamais pro avec l’Olympique lyonnais, le cas Willem Geubbels met en lumière les dérives de jeunes joueurs, souvent mal représentés.

Il n’a que 16 ans et fait déjà plus parler de lui que certains de ses aînés. Après avoir battu des records de précocité durant la première partie de saison, Willem Geubbels se distingue, depuis, pour autre chose que ses performances sur le terrain. Invité à répondre à la proposition de son premier contrat professionnel avec l’OL, le jeune attaquant, par l’intermédiaire de son père Ludovic, a décliné l’offre. « C’est sa décision. La décision de son entourage aussi. J’en prends acte et je la respecte même si, à mon avis, ce n’est pas la bonne », regrettait Bruno Genesio, très amer, vendredi dernier. Sous contrat aspirant jusqu’en juin 2019 avec Lyon, l’international français des moins de 17 ans se dirige vers la sortie. Dans un communiqué, l’AS Monaco a « confirmé son intérêt » pour le joueur, tandis que d'autres clubs européens se seraient aussi positionnés.

Pendant de longues semaines, l’OL a pourtant fait des pieds et des mains pour que le prometteur attaquant signe son premier contrat professionnel avec son club formateur. « L'Olympique Lyonnais rappelle qu'il a tout entrepris pour répondre favorablement aux demandes qui lui ont été formulées par Ludovic Geubbels, le père du joueur, et par Maître Philippe Veber », écrivait le club rhodanien dans un communiqué, jeudi dernier. Ni la « formation personnalisée avec des cours d'anglais, de néerlandais, de piano et de media training », ni des « propositions (financières) extrêmement importantes avec un plan d'évolution en fonction de ses participations futures avec le club et de ses sélections en équipe de France », n’ont suffi à convaincre le « clan » Geubbels, comme l’appelle l’Olympique lyonnais. C’est ce « clan », qui n’a pas été convaincu par le projet sportif de l'OL, alors que le joueur a déjà effectué quatre apparitions avec les professionnels (deux en Ligue 1, une en Ligue Europa, une en Coupe de la Ligue).

Geubbels n'est pas un cas isolé

Dans ce dossier épineux, Jean-Michel Aulas regrette de ne pas avoir rencontré Willem Geubbels en personne. Son père Ludovic, a mené les négociations avec son avocat. « Les entourages des joueurs deviennent de plus en plus difficiles à gérer. Ils pensent que l’herbe est plus verte ailleurs, qu’il faut gagner le plus d’argent, le plus vite possible », nous confie l’agent de plusieurs joueurs de haut niveau. Et de poursuivre : « Dans ce dossier, j’ai plutôt tendance à croire la bonne foi de l’OL, et la mauvaise foi de l’entourage de ce joueur. Mais quand on dispose d’un talent comme celui-là, c’est toujours plus facile d’aller le monétiser ailleurs ». C’est ce que s’apprête à faire le « clan » Geubbels.

Le cas de l’attaquant lyonnais n’est pas un cas isolé. Avant lui, de nombreux autres joueurs ont pâti des agissements de leur entourage. Il y a eu les nombreuses frasques de Véronique Rabiot, la mère de l’international français du PSG, ou encore les choix douteux de Willy Ndangi, le père de Giannelli Imbula. Après une excellente saison 2014-2015 à l’OM, l’ancien Guingampais (22 ans à cette époque) s’envolait pour le FC Porto, permettant à son géniteur de toucher une commission de 2M€, d’après L’Equipe. Six mois plus tard, le milieu signait à Stoke City, alors qu’il éprouve toutes les difficultés du monde à se montrer performant à Toulouse, où il est aujourd’hui prêté. « Quand tout va bien, c’est toujours facile d’être le parent. Mais quand ça va mal, ça peut arriver, à ce moment-là, le joueur se retrouve dans une situation où beaucoup moins d’agents s’intéressent à lui pour vraiment le conseiller, l’aider avec son réseau, souligne notre agent. Il se retrouve, alors, dans la jungle à choisir tout et n’importe quoi car il agit avec désespoir ». Si rien ne dit que Geubbels ne réussira pas ailleurs qu’à l’OL, il semblait pourtant dans les meilleures conditions pour y parvenir.

L’OL, le choix de la raison

Arrivé à l’Olympique lyonnais à l’âge de 9 ans, Willem Geubbels a grandi plus vite que ses camarades du centre de formation. Souvent surclassé, le jeune attaquant a appris à composer avec une pression égale à son talent. Forcément, cela ne passe pas inaperçu. A l’image de Kylian Mbappé (19 ans), pris comme modèle dans les négociations financières, l’ailier lyonnais suscite les convoitises depuis toujours. Avant qu’il ne signe pro à Monaco, l’actuel attaquant du Paris Saint-Germain était courtisé par les plus grosses écuries européennes. Après d’intenses et longues négociations entre le club de la Principauté et le père du joueur Wilfried, le feu follet de Bondy s’était finalement engagé avec son club formateur. Bien lui en a pris. « Le club qui t’a formé, donné une opportunité, mérite aussi de gagner de l’argent sur ta vente. Ça fait partie du système, rappelle notre agent. Il aurait peut-être été plus malin pour le père de négocier 30% sur le prochain transfert, de le fixer à 25M€ ou 50M€, avec comme garanties de jouer X matches… Vraiment profiter de la situation dans laquelle il était, parce que, je pense, qu’il s’est un peu foutu de l’OL, tout le monde sait depuis six mois qu’il ne va pas renouveler. »

Le jeune ailier aurait pourtant été bien inspiré de le faire. Après Karim Benzema, Hatem Ben Arfa, Alexandre Lacazette ou Nabil Fekir, le garçon semblait retenir toutes les qualités pour devenir le nouveau talent estampillé OL. « On parle de quelqu’un d’assez exceptionnel pour son âge. Mais est-ce que l’OL n’est pas le meilleur club pour se développer, surtout en tant qu’attaquant ? Se demande notre agent. Monaco est un très bon club, c’est sûr. Mais à part payer plus, qui peut mieux l’aider à se construire que l’OL ? » Troisième club formateur d’Europe, l’Olympique lyonnais va voir filer un joueur auquel il aurait pu beaucoup apporter. Symptomatique des dérives d’une nouvelle génération. « Je crains qu’on voit de plus en plus de jeunes joueurs partir de leur club formateur avant de signer pro. Ce n’est pas nouveau, on le voit déjà depuis quelques années avec des joueurs français qui partent en Angleterre et ne percent pas. Ce phénomène ne va que s’accélérer », pense notre agent. L’OL pourra au moins se consoler en récupérant une indemnité de transfert, puisque le contrat stagiaire de Geubbels court jusqu’en juin 2019. Le club rhodanien peut aussi se dire que d’autres jeunes très courtisés, comme Houssem Aouar avant qu’il n’explose, optent pour le choix de la raison.